Marguerite

MC. a dit : « faisons un dîner avec toutes nos amies célibataires », j’ai réfléchi, j’ai pensé à toutes celles qui étaient ailleurs, celles qui étaient tristes, et celles qui étaient prises. Il ne restait personne. Personne. J’ai longtemps attendu le métro avant de me rendre compte qu’il était tard, j’avais la nausée, et des larmes au bout de la gorge. J’ai descendu la rue m*ntorgueuil, de la musique violente en fond. Je confonds toujours fond et fonds. C’est quoi ton business model ? J’ai peur tous les soirs en rentrant chez moi, peur que la lumière soit allumée, que tout soit chamboulé, comme ce soir de rentrée de prépa. Le commissariat, une culotte Tara J*rmon, tout ça. Je suis triste sans l’être vraiment. Je me sens blasée. J’ai remonté sur mon profil FB à des années lumières, à des choses drôles et touchantes que j’avais oubliées. Je sens cette angoisse latente qui remonte, encore. J’essaie de me moquer de tout, de ne rien ressentir, j’essaie d’anesthésier la douleur, la souffrance, et cette vague rébellion qui me brûle le ventre parfois. Au premier concours blanc, nous avions eu le sujet suivant en économie : « pourquoi la croissance, la croissance pour quoi ? ». Le plan était assez évident. J’avais eu 17. Nous étions assis côte à côte pendant l’épreuve avec Edouard, je mangeais du chocolat noir jusqu’à l’écœurement, en écrivant des pages et des pages. Et cette question reste vraie. Le long du chemin, on apprend à l’oublier, à rentrer dans la pratique, à sortir du sens des choses pour lequel nous nous battions dans « le meilleur lycée de France ».  J’ai toujours été libérale au sein européen du terme, que chacun fasse ce qu’il veut et qu’on me laisse tranquille. Mais il n’empêche, que reste-t-il sans cet instinct de vie qui nous pousse à croître ? Quel sens, quel but ? Que faisons-nous ? Détruire ou construire ? La vie est faite de cycle économique. Le cycle c’est l’éternel retour, tourner en rond. Voici où je suis.